Newsletter 44 – Emploi des seniors en France : l’âge n’est pas une maladie !

Partager cet article :

emploi senior france

Ce n’est pas la rémunération qui fait l’activité

Si les retraités sont définis comme inactifs, alors que toutes les études démontrent le contraire, c’est qu’on confond trop souvent emploi et activité.

Or on sait à quel point, après leur carrière professionnelle et leur départ à la retraite, la plupart des seniors ont des emplois du temps de ministre, tant ils ont d’activités de loisirs et d’entraide, mais aussi dans les secteurs marchands et non marchands (que deviendrait la vie associative sans eux ?).

 

Cette notion de « vieillissement actif », rendu possible par une réduction du temps de travail et une adaptation des postes, les entreprises des pays nordiques l’ont déjà intégrée et les résultats sont là : le taux d’emploi des seniors est parmi les meilleurs, alors qu’en France, il est inférieur à la moyenne européenne de cinq points.

Comme on ne peut pas faire le même métier de la même façon toute sa vie, il s’impose d’aménager les fins de carrière en fonction des besoins spécifiques des seniors pour continuer à bénéficier de leurs incontestables atouts. En ces temps où l’on peine à recruter, ils constituent un vivier de talents accessibles, dès lors que les RH œuvrent à la fluidité des parcours professionnels en combinant savamment compétences, capacités et aspirations de chacun pour faire évoluer sa place dans l’entreprise à chaque âge de sa vie.

 

Aborder l’âge comme un précieux marqueur de la diversité

 

Dans un atelier d’artisanat d’art, il va de soi que les savoir-faire se transmettent des plus âgés aux plus jeunes, logiquement moins bien payés qu’eux.

A contrario, sur bien des postes, la révolution digitale et des ruptures technologiques ont rebattu les cartes en exigeant une adaptation pas toujours facile pour les aînés.

Il convient donc de dépasser ce poncif des seniors plus expérimentés mais dont on se sépare à cause de leur rémunération trop coûteuse et à la faveur de dispositifs financés par la collectivité.

Si les jeunes – dont l’intelligence dite fluide irait plus vite pour traiter intuitivement les situations – sont plus agiles et totalement rompus aux nouveaux modes de communication, les seniors – à l’intelligence dite cristallisée mieux capable de se référer aux données existantes – montrent plus de fidélité à l’entreprise, plus d’assiduité, plus de sang-froid et de résilience face aux crises (ils en ont tant traversées !) et moins de dépendance à la gratification immédiate.

Mais toutes les générations se rejoignent sur un point essentiel : trouver du sens à son travail, se sentir utile et voir sa contribution reconnue. Offrir aux jeunes collaborateurs le spectacle d’une sorte de maltraitance envers les seniors, qu’on remercie après des décennies de bons et loyaux services, n’est pas fait pour tempérer leur mentalité plutôt mercenaire. Plus grave : contester le droit à durer reviendrait à discriminer en fonction de l’âge, qui est un marqueur de la diversité aussi respectable que bien d’autres aujourd’hui pris en compte par les politiques d’inclusion.

 

Les bénéfices d’un management intergénérationnel

 

Et si une équipe était plus forte quand des baby-boomers y côtoient des collaborateurs des générations X et Y (voire Z pour les stagiaires et apprentis) ?

Le manager qui en est convaincu doit, pour gérer des collaborateurs si divers, apprendre à tenir compte de leurs valeurs respectives et de leurs préférences (loyauté et management « directif » pour les seniors, flexibilité et management « participatif » pour les juniors), ainsi que de leur style de communication divergent.

Il y gagnera beaucoup car l’apprentissage intergénérationnel promeut le dialogue et le respect mutuel, en même temps qu’il favorise l’innovation, pour laquelle les jeunes sont plus efficaces mais les seniors plus efficients.

Son équipe s’en trouvera plus productive et plus inclusive.

 

Un silver recrutement finalement aussi fructueux que la silver économie

 

Comment faire se rencontrer l’offre actuelle de seniors compétents et motivés, en recherche d’un travail valorisant mais aménageable, et la demande des entreprises en mal de talents engagés?

Quelques grands axes se profilent :

  • Former au management intergénérationnel,
  • Mettre en place des groupes de travail pour bien comprendre les aspirations des seniors et proposer des conditions de travail adéquates,
  • Continuer à « arroser les plantes seniors » en donnant accès à tout âge aux programmes de développement des compétences,
  • Inventer des formules d’aménagement du temps sur la journée ou la semaine avec une diminution minime de salaire, compensée par une transmission des compétences à un jeune.

Revient aux DRH d’avoir désormais l’audace de lancer ces actions tout en « vendant » des profils seniors aux décideurs.

Et aux seniors eux-mêmes d’entrer dans une logique d’action en faisant valoir leur valeur-ajoutée : expérience et transfert de leurs savoirs, loyauté et disponibilité, efficience dans l’innovation.

Les entreprises y gagneront en crédibilité quant à leur volonté d’inclure et tiendront mieux leur rang pour que puissent réussir les grandes mutations sociétales.

 

Pour aller plus loin…

les cles du mnagement intergenerationnelLes clés du management intergénérationnel de Agnès Beligond, 2018, Afnor.

Toutes les organisations sont aujourd’hui confrontées au défi du management intergénérationnel et de la transformation de l’organisation. Comment faire travailler ensemble des générations aux valeurs apparemment opposées ? Comment passer d’un management vertical au management horizontal et collaboratif qui motive les plus jeunes générations ? Comment fédérer les collaborateurs autour des valeurs de l’entreprise ? Autant de questions auxquelles Agnès Beligond, consultante en organisation et management de l’innovation, répond dans cet ouvrage écrit dans un langage simple et clair.

 

 

50 ans et apres50 ans, et après ? La réponse en 50 portraits de Eric Dudan, 2006, Timée Editions.

Pourquoi les seniors sont-ils considérés comme une faiblesse, une charge pour la société ? Notre société est certes vieillissante, mais nous devrions nous en réjouir, comme le montre cet ouvrage plein d’optimisme. Il dresse le portrait de femmes et d’hommes qui, après 50 ans, ont réalisé d’improbables projets, vécu les rêves insensés de leur enfance, bâti des empires aux quatre coins de la Terre ou accompli des exploits extraordinaires ! Enzo Ferrari, Gustave Eiffel, Churchill et De Gaulle, Louis Pasteur, Gutenberg, Nelson Mandela, Dom Pérignon… Ils sont tant à ne nous avoir donné le meilleur d’eux-mêmes que sur le tard…