Newsletter 59 – Stress au travail : la concentration comme antidote

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Dans un monde où l’hyperconnexion domine, la concentration pourrait bien être notre meilleure alliée pour réduire le stress. Pourtant, elle est constamment mise à mal par des interruptions fréquentes et nos propres exigences personnelles. Entre la réactivité imposée par les technologies modernes et la nécessité de préserver notre santé mentale, il est urgent de réapprendre à travailler autrement pour conjuguer performance, sérénité et satisfaction.

Et si la concentration devenait notre meilleure arme contre le stress ?

« Calme-toi, relax ! » « Détendez-vous ! » Telle est la recommandation que nous inspire toute personne stressée, en toute logique face à l’état de tension qu’elle manifeste.

Pourtant, dans une interview parue dans Le Point en mars 2024, la neuroscientifique canadienne Sonia Lupien défend une approche radicalement différente : ce n’est pas en se détendant mais au contraire en se concentrant qu’on réduit au mieux son stress.

Or notre concentration est rendue difficile au travail où notre attention est constamment fragmentée, du fait des interruptions fréquentes que nous subissons mais aussi de notre propre réactivité aux signaux incessants des technologies modernes.

Bref, par ses compétences et talents personnels, chacun de nous serait un lion prêt à montrer toute sa puissance mais… qu’une simple mouche peut rendre fou ! Comment nous garantir une concentration durable ?

Pour ce faire, il convient de distinguer le stress extrinsèque, lié aux sollicitations extérieures, et le stress intrinsèque, fomenté dans notre for intérieur par l’étau de nos attentes insatisfaites et de nos exigences excessives à l’égard de nous-mêmes.

 

Les interruptions sont-elles vraiment responsables de notre épuisement ?

Le stress extrinsèque provient de notre environnement immédiat.

Il relève de toutes sortes de facteurs : bruit ambiant des Open Spaces, échanges tendus lors de demandes imprévues et urgentes, surcharge de tâches, notifications continues… Sonia Lupien souligne que chaque interruption inflige une charge cognitive élevée, obligeant notre cerveau à « réamorcer » son attention.

Des études montrent qu’il faut jusqu’à 25 minutes pour retrouver pleinement sa concentration après une coupure.

Mais l’idée de neutraliser ces perturbations se heurte à la réalité professionnelle contemporaine, qui valorise tant la réactivité et l’agilité, instaurant les interruptions comme faisant finalement partie intégrante du job.

En revendiquant qu’elles soient régulées, ne risquons-nous pas d’être considérés comme inaptes à soutenir le rythme ? Si l’entreprise peut toujours améliorer les conditions de travail de ses collaborateurs, il faut sans doute aussi que chacun redéfinisse son propre rapport au travail.

 

Notre propre posture nous maintiendrait-elle dans un cycle de tension ?

Convenons que nous créons nous-mêmes un stress intrinsèque, qui peut mener à l’épuisement professionnel.

Avant même d’être confrontés à ce que qui fragmente notre concentration, nous sommes susceptibles de nous mettre la pression par notre perfectionnisme, notre peur de l’échec, notre obsession de la performance.

Nous voulons tout gérer en même temps.

Or, comme dit le proverbe, « qui trop embrasse, mal étreint ».

En faisant un peu de tout sans rien achever vraiment, on alimente son stress intrinsèque, si invisible soit-il, car on a l’impression de stagner.

Or ce stress sera d’autant mieux jugulé qu’on aura l’impression de progresser, car notre cerveau fonctionne de manière optimale lorsqu’il perçoit une avancée claire.

Dès lors, comment redéfinir le juste équilibre entre performance moyenne sur tous les fronts et satisfaction d’avoir pleinement atteint un objectif précis ?

 

Le sweet spot de concentration conjugue engagement et sérénité

Au tennis, le sweet spot est ce point idéal où la balle doit frapper la raquette pour être renvoyée avec force et précision.

Son équivalent au travail se situerait à l’intersection de ce que l’on aime faire et de ce que l’on fait bien.

C’est là qu’on trouvera un antidote naturel au stress, dans un état d’engagement sans surcharge mentale.

Mais peut-on trouver son sweet spot dans un environnement où les interruptions dament sans cesse le pion à la concentration ?

Cela suppose préalablement d’évaluer nos tâches différemment, en fonction de deux critères : notre niveau de compétence et le plaisir que nous ressentons à les réaliser. Le sweet spot se trouve dans la zone où ces deux éléments convergent, générant simultanément une productivité et une satisfaction optimales.

L’entreprise pourrait mieux accompagner ses collaborateurs si elle leur fournissait un « outil sweet spot » leur permettant de classer leurs tâches en fonction de leur degré d’intérêt et de maîtrise conjoints, un outil qui serait précieux pour qu’ils s’alignent mieux avec eux-mêmes.

Il conviendrait ensuite qu’ils ralentissent pour se recentrer sur leurs tâches essentielles, autrement dit qu’ils puissent renoncer à répondre à certaines sollicitations. Cela ne dépend évidemment pas que d’eux-mêmes mais d’une conscience du bénéfice et d’une volonté de la Direction de l’entreprise et des RH de rendre ce processus possible.

 

Le Focus Friday et le flow : immersion totale et réduction durable du stress

Si l’artiste à l’ouvrage est sérieux comme… un enfant qui joue, c’est parce qu’il est dans le flow, cet état de concentration intense où l’on est totalement et plaisamment absorbé par sa tâche.

Cet état, décrit par le psychologue Mihaly Csikszentmihalyi, se produit lorsque nos compétences sont pleinement mobilisées dans une activité qui nous engage.

Le flow apporte un tel sentiment de productivité, de contrôle et d’accomplissement que l’effort nous satisfait sans générer aucun stress.

Atteindre un tel état suppose du temps disponible pour accomplir notre tâche sans que rien ne vienne nous en distraire.

C’est ce que vise le Focus Friday, une pratique visant à réserver une journée sans réunions ni interruptions pour que chacun puisse se consacrer à son travail en profondeur.

L’organisation efficace de l’activité gagnerait donc à créer de tels créneaux temporairement libérés des obligations de fonctionner en multitâche et d’être immédiatement disponible.

Ce serait une valeur forte d’une culture d’entreprise que de moduler l’injonction de réactivité pour construire un environnement de travail qui respecte mieux le rythme du cerveau humain et favorise une productivité durable.

 

Concentration et hyperconnexion : apprendre à mettre le stress en pause

Le fait est que nous travaillons désormais dans un monde hyperconnecté et que nous ne reviendrons pas en arrière.

Mais gardons bien à l’esprit qu’à long terme, la « précarité temporelle » (conceptualisée ainsi en sciences sociales pour désigner le manque constant de temps) fait baisser la productivité et mène au burn-out.

Il conviendrait d’apprendre à mettre parfois les sollicitations en pause, de façon ciblée et réfléchie, pour retrouver un équilibre plus durable et un nouveau mode d’efficacité, fondé sur le plaisir du travail bien fait, profitable à l’individu comme à son équipe.

Dans cette perspective, vouloir réhabiliter la concentration qui atténue le stress est donc moins un retour en arrière qu’une évolution salutaire dans nos pratiques : il s’agit de conjuguer les bénéfices de l’hyperconnexion avec ceux de l’attention soutenue.

 

Et vous qu’êtes-vous prêt à changer pour vous prémunir du stress et construire un équilibre plus sain entre performance et satisfaction ?

 

Pour aller plus loin…

trouver le flowTrouver le flow pour les débutants, de Katharina Neuberg, 2023, 66 pages.

Comment atteindre facilement l’état de flux et travailler plus vite, mieux se concentrer et être plus satisfait avec une productivité insoupçonnée ? Ce livre vous fera découvrir non seulement ce que le stress permanent, les soucis et le manque de motivation font exactement à votre santé et à vous-même, mais aussi ce que vous pouvez faire pour y remédier.

Car oui, il est possible de travailler sans cette inertie. Il est même possible de se détendre davantage au travail que pendant ses loisirs. Dans ce cas, non seulement le temps passe vite, mais de plus, on en profite. Pour cela, il suffit de réussir à travailler dans le flux, le flow.

Initiation au flow. S’épanouir dans le flow, de Philippe Bruzzone, 2023, 74 p

Cet ouvrage vous invite à plonger dans le monde fascinant de l’état de flow. Vous découvrirez non seulement les secrets de cet état mental exceptionnel, mais vous apprendrez également à l’intégrer dans votre vie quotidienne grâce à un protocole de six semaines, comprenant des exercices de respiration et de méditation.

Dans ce livre captivant, l’auteur vous emmène dans un voyage profond pour comprendre les mécanismes de l’état de flow, cet état de concentration optimal où le temps semble s’effacer, où la créativité s’épanouit, et où la productivité atteint son apogée.