Newsletter 24 – Inutile mais indispensable présentiel…

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De providentiels outils numériques
Il n’est d’épreuve qui ne prodigue quelque enseignement… Celle du confinement imposé par la pandémie nous a exercés, voire initiés, à l’usage de providentiels outils numériques : ceux qui nous ont permis d’être là où nous n’étions pourtant pas, ensemble dans l’espace fictionné par nos écrans. Nous avons pu nous rencontrer, nous voir, nous parler et nous écouter. Ouf ! Le contact a vite été rétabli pour travailler malgré tout : échanger des informations, conduire des projets, débattre et décider, former, coacher… L’efficacité a donc été au rendez-vous, et même davantage : pas de temps gâché dans les transports, une écoute plus active que jamais puisque la visioconférence rive les regards et interdit les chevauchements de parole… Pourtant, chacun de nous sent bien que le compte n’y est pas.

Le temps bénéfiquement perdu dans la convivialité
Nous avions beau savoir à quel point le lien social est une composante majeure de la vie active, nous payons cash d’en être aujourd’hui privés par le télétravail. Il s’épanouissait en apartés de nos exercices professionnels : pauses café ou déjeuner, conversations informelles dans les couloirs, célébrations diverses … C’est à tel point que, le vendredi en fin de journée, certaines petites entreprises ressentent actuellement le besoin d’organiser de ludiques apéros en ligne : se donner des nouvelles personnelles, se réconforter, s’encourager ou se taquiner, se plaindre et rire ensemble… Autant de bribes d’une convivialité bien réelle dans un espace toujours désespérément virtuel.

Les apports irremplaçables du contact direct
C’est bien au travers des contacts directs avec son entourage et son environnement que le petit de l’être humain s’édifie, en expérimentant concrètement ses perceptions sensibles qui finiront par le doter d’une expérience vraiment personnelle. Durant un spectacle vivant (théâtre, tour de chant ou concert), nous éprouvons ce qui vibre autrement fort que dans toute retransmission sur écran ! Cette nécessaire présence des corps, les dispositifs mis en place pour travailler malgré la crise ne parviennent pas à totalement la disqualifier. Être incarnés les uns devant les autres nous apporte paradoxalement comme un supplément d’âme. A quoi cela tient-il ? Une captation plus subtile de la voix, des mouvements, de la communication non-verbale ? Au trop sous-estimé prodige d’être ensemble ? Là où le distanciel parvient à sauver l’interaction performante, seul le présentiel nous permet d’accéder à de l’authentique interrelationnel et à ses possibles approfondissements.

Que reviennent les jours finalement heureux où, fatigués par nos déplacements et agacés par tous ces petits riens du collectif qui parasitent l’avancée de notre travail personnel, nous pourrons regoûter et peut-être mieux comprendre cette indispensable ressource énergétique : nos présences conjointes !

Pour aller plus loin…

« La rencontre » de Charles Pépin
Allary Editions – 14 janvier 2021

La rencontre – amoureuse, amicale, professionnelle – n’est pas un « plus » dans nos vies. Au cœur de notre existence, dont l’étymologie latine ex-sistere signifie « sortir de soi », il y a ce mouvement vers l’extérieur, ce besoin d’aller vers les autres. Cette aventure de la rencontre n’est pas sans risque, mais elle a le goût de la « vraie vie ».

De Platon à Christian Bobin en passant par Belle du Seigneur d’Albert Cohen ou Sur la route de Madison de Clint Eastwood, Charles Pépin convoque philosophes, romanciers et cinéastes pour nous révéler la puissance, la grâce de la rencontre. En analysant quelques amours ou amitiés fertiles – Picasso et Éluard, David Bowie et Lou Reed, Voltaire et Émilie du Châtelet… –, il montre que toute vraie rencontre est en même temps une découverte de soi et une redécouverte du monde.

Une philosophie salutaire en ces temps de repli sur soi.