Newsletter 12 – Le nouveau visage des DRH

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« S’il te plaît, dessine-moi un(e) DRH ? »

 

Le collectif des DRH lui-même s’est essayé à spécifier cette fonction lors des fréquents séminaires et conventions qu’il organise et au fil des nombreux livres et revues qu’il produit. La difficulté de l’exercice tient à l’ambiguïté du titre « Direction des Ressources Humaines » : dans un monde où l’Humanisme est consacré, l’Homme ne doit jamais être un moyen mais une fin en soi, alors que le réalisme économique oblige à le considérer aussi comme une ressource. Comment lever cette ambiguïté ?

DRH, une fonction complexe
En synthèse, il semble que la définition la plus consensuelle soit à la conjonction de deux ambitions : être à la fois « le champion de l’entreprise ET celui du salarié », Business Partner et garant de bien-être au travail, producteur de résultats en même temps que d’engagement épanoui.
L’énoncé d’une telle ambition suffit à révéler la complexité de la fonction. Le fait qu’au sein de nombre d’entreprises, on formule des appréciations mitigées et des questionnements acides récurrents sur l’efficacité ou le positionnement du/de la DRH illustre la difficulté qui lui échoit d’être à la fois un stratège au Comex, un leader dans sa filière, un interlocuteur respecté des salariés et de leurs représentants, un soutien apprécié du management opérationnel, un communicant entraînant, une conscience éclairante. Dès lors, comment mesurer la bonne manière d’incarner une fonction aussi polymorphe ?

Des indicateurs de réussite non stabilisés
Les indicateurs de succès d’un(e) DRH sont multiples, controversés et différents d’une entreprise à l’autre, montrant qu’être à la fois le champion de l’entreprise et celui du salarié ne se mesure pas et donc ne s’entend pas de la même manière selon la philosophie de gouvernance en place. Il suffit de s’attarder sur ceux qui, depuis 15 ans, ont été sacrés « DRH de l’année » pour s’étonner que certaines des entreprises ainsi mises à l’honneur ne se signalent ni par leurs résultats ni par leur réputation particulière en matière de corps social harmonieux.
Que dire donc d’une fonction où sont honorés des membres qui ne satisfont pas à l’ambition définie par la profession elle-même ? Ne peut-on faire l’hypothèse qu’elle n’a pas encore gagné ses lettres de noblesse et qu’elle peut progresser en maturité ?

Le/la DRH accompli(e)
Pour satisfaire au mieux aux exigences de cette fonction, il faut une personnalité consistante, une relation d’exceptionnelle qualité avec le dirigeant, une mesure d’impact appropriée.

Un(e) DRH de caractère. A l’évidence tant elles sont diverses et particulières, les qualités nécessaires à un(e) DRH sont plus l’expression d’une personnalité que de la traduction de compétences techniques. L’intelligence doit y côtoyer la conscience morale, la subtilité s’arranger de sensibilité, la vision stratégique se compléter de rigueur opérationnelle, l’humanité s’accompagner de talents de communication simple et convaincante. Ces personnalités existent. Les recruter demande à ce qu’on les recherche en tant que telles.

La symbiose DRH-Dirigeant. Quand on cherche à nommer spontanément les entreprises qui nous semblent refléter cette double caractéristique d’efficacité économique et de climat humain irréprochable, on y trouve fréquemment à leur tête un binôme dirigeant-DRH aligné sur les mêmes valeurs et objectifs. Le/la meilleur(e) DRH ne peut s’exprimer parfaitement qu’en harmonie avec son/sa DG qui porte et incarne la même volonté de réussir grâce aux Hommes et non pas malgré les Hommes.

Une mesure d’impact stimulante. La fonction d’un(e) DRH ne peut se résoudre à maîtriser des coûts et des risques. Ses indicateurs de réussite ne peuvent donc se réduire à la maîtrise de la masse salariale, de l’absentéisme et de quelques objectifs de RSE. L’importance de la fonction exige qu’elle ne soit pas appréciée seulement par des indicateurs de restriction mais aussi par des indicateurs de développement ou d’épanouissement. Enlevons déjà de DRH le mot « Ressources » qui souligne le versant gestionnaire de cette activité. Le meilleur exemple de cette reconnaissance est donné aujourd’hui par ces start-up qui, ayant franchi le premier stade du succès assuré par leurs créateurs, se voient contraintes de recruter spécifiquement un(e) DRH pour embaucher, structurer, organiser, mettre en place l’organisation humaine indispensable à la poursuite de leur développement. Le succès de ce(tte) DRH se jauge alors aux mêmes indicateurs de finalité que son patron : résultats et enthousiasme, croissance forte et engagement épanoui. L’Homme devient ainsi une finalité.

Autant les indicateurs financiers sont là depuis toujours, autant le choix, la définition, l’acceptation et la prise en compte de ceux traduisant l’engagement harmonieux du corps social sont encore sur le métier de ces DRH de demain. Ils seront d’autant plus reconnus qu’ils seront signifiants d’une réalité évidente et significatifs d’une forte ambition.
La DRH aura alors réalisé sa double vocation : mettre au service de l’entreprise des collaborateurs compétents et engagés ET accompagner ceux-ci dans leur volonté de faire de leur travail une source d’épanouissement personnel.

Dans les pays baltes, les Ressources Humaines au cœur d’un double-partenariat


La fonction de DRH est aujourd’hui dans cette région en pleine évolution, notamment en Estonie, portée par la croissance impressionnante des start-ups et la culture digitale. Les Ressources Humaines y sont vues comme un partenaire autant du management que des salariés, responsable du bien-être de chacun mais aussi du respect des objectifs budgétaires de l’entreprise.

Près de 30 ans après avoir obtenu leur indépendance et connu une quinzaine d’années difficiles sur le plan économique, les pays baltes peuvent aujourd’hui compter sur un virage numérique pris très tôt, notamment en Estonie. La célèbre plateforme vidéo Skype y a ainsi vu le jour et la Lettonie voisine a déjà entièrement couvert son territoire de bornes de recharge pour voitures électriques. Si la situation économique est certes encore fragile, certaines entreprises, particulièrement dans le digital, ont connu une croissance spectaculaire, accompagnée de besoins importants en recrutement et en gestion des talents. L’Estonie compte ainsi 430 start-ups pour une population de 1,3 million d’habitants. Un record. Pourtant, compte tenu de la taille modeste de la plupart des organisations, la fonction RH n’est pas toujours représentée. On compte moins de 400 Responsables de Ressources Humaines dans toute l’Estonie. Mais leur rôle est de plus en plus déterminant dans la vie de l’entreprise.

Une vision traditionnelle plus « administrative »
Cyrielle, étudiante en droit européen, a passé près d’un an dans ce pays en 2017, d’abord en stage au sein de la banque SEB : « Dans les grandes entreprises, la vision traditionnelle d’un Responsable Ressources Humaines est au départ plus « administrative » que chez nous », explique-t-elle. « Il ou elle est surtout en charge de la paie, de la gestion des congés – très réglementée dans ce pays – mais tout de même aussi du recrutement, ce qui constitue finalement le plus grand défi de la fonction : il y a peu d’actifs en Estonie (environ 700 000) et recruter à l’étranger quand on est une banque n’est pas sans poser problème. D’autant que le CDI est plutôt la norme, les CDD étant réservés aux emplois saisonniers. Mieux vaut ne pas se tromper. Et attirer les talents n’est pas facile avec un salaire moyen autour des 1 000 euros et peu de possibilités d’incentive, si ce n’est la sécurité de l’emploi… » En revanche, ils s’occupent ensuite peu de la vie quotidienne à l’intérieur de l’entreprise, du climat social et de la motivation des troupes.

« Une position aujourd’hui plus équilibrée et une double-responsabilité »
Après son stage à la banque SEB, Cyrielle a poursuivi son expérience estonienne par une mission de six mois dans une start-up, à Telliskivi, la « ville du numérique » située au nord-ouest de Tallinn. Elle y a découvert une situation différente : « Au sein de l’entreprise technologique à laquelle j’appartenais, qui comptait 90 personnes et plusieurs filiales en Europe, nous avions un Responsable Ressources Humaines. Son rôle était – contrairement à ce que j’avais connu lors de mon expérience en banque – très peu administratif. Il était clairement là pour faciliter la vie de chacun, tout en étant l’un des principaux garants de la pérennité de l’entreprise, grâce au respect scrupuleux des budgets. Et c‘était très clair sur ce point. Son bureau était juste à côté de celui du fondateur, mais sa porte à lui était toujours ouverte et on pouvait aller le voir pour n’importe quelle question : travailler à la maison deux jours par semaine plutôt que cinq ? C’était aussi à lui qu’incombait la tâche de trouver des bonus motivants, différents chaque année. Pas question de primes en général, mais plutôt des voyages présentés comme des « expériences exceptionnelles ». Il était clair pour chacun que le DRH devait avoir une position équilibrée et une double responsabilité : vis-à-vis des collaborateurs et vis-à-vis du management. Une forme de double partenariat, en quelque sorte. »

Un minimum de strates hiérarchiques. Voire aucune…
Le cas de figure le plus répandu reste tout de même celui d’entreprises où le manager joue également le rôle de DRH. C’est le cas par exemple de MarkIT, une start-up fondée à Tallinn et qui s’est déjà considérablement développée, avec une croissance de 22 % par an en moyenne depuis 10 ans. Avec une quinzaine de filiales, elle compte une centaine de collaborateurs et propose aux entreprises de leur fournir du matériel informatique en s’approvisionnant directement auprès des fabricants. Ici, pas de DRH, même si un poste de direction est tout de même désormais dédié au recrutement. Ce sont donc les managers eux-mêmes qui portent et développent la politique de Ressources Humaines de l’entreprise. MarkIT considère que l’essentiel de sa valeur repose sur l’excellence de sa relation client et que c’est aux managers de transmettre directement cette culture aux collaborateurs, avec un minimum de strates hiérarchiques. Voire aucune… La personnalité des candidats, leurs valeurs, sont ainsi au moins autant scrutées que l’expérience professionnelle et les compétences. Et le CEO, Andres Agasild, les rencontre personnellement en entretien pendant le processus de recrutement.
Une fois intégrés à l’entreprise, les nouveaux employés gardent cette possibilité de parler directement et très librement au top management. « Un membre de la Direction s’adresse réellement de la même façon à un cadre exécutif ou à un agent de comptabilité récemment intégré », confirme un commercial de l’entreprise, « et donne ainsi à chacun le sentiment d’être un rouage indispensable. D’ailleurs il y a très peu de turn-over chez nous ». Une attitude qui participe de la motivation de chacun. La direction de MarkIT part également du principe que, si les objectifs fixés sont assez hauts, « chacun mérite les meilleures conditions pour les atteindre ». Il est par exemple possible de choisir de travailler sur ordinateur MAC ou PC selon ses préférences, ou d’aménager son temps de travail avec une grande autonomie. En résultent moins de conflits de type organisationnel. Quant aux autres sources de motivation, elles tiennent aussi au fait que, compte tenu des résultats de l’entreprise depuis quelques années, le niveau de rémunération est plutôt supérieur à la moyenne du secteur.

Les « nouveaux DRH » peuvent sans doute être amenés à s’inspirer aujourd’hui de ce modèle, moins hiérarchisé et accordant une grande place à l’humain et à l’épanouissement individuel… Sans perdre de vue pour autant la stratégie et les contraintes de l’entreprise. Un rôle dès lors d’autant plus central et déterminant dans le recrutement et le management des talents qu’il leur permettra de faire vivre dans toute sa dimension leur vision des « Ressources Humaines ».

La gestion des ressources humaines dans eGoPrism


Quel profil eGoPrism présentent les personnes chargées de la gestion des ressources humaines en entreprise ? Si chacune a sa personnalité propre attestée par la singularité de son eGoPrism, on observe toutefois des éléments structurels récurrents : tout d’abord un talent Relationnel dominant et complet. Une Négociation mobilisée est bien entendu requise. Elle dote d’un bon sens du dialogue en se combinant à la Communication et, avec l’Innovation, dispose à faire converger les points de vue d’une pluralité de décideurs, savoir-être indispensable pour mener les projets adéquate. La Communication alliée à l’Innovation garantit une ouverture d’esprit propre à accompagner tout collaborateur.
On constate également chez les responsables RH un périmètre du Commandement dominant. La Transmission, d’autant plus mobilisée que le niveau de responsabilité est haut, se conjugue avec l’Innovation pour exercer le leadership transversal souhaitable dans ce domaine. Les RH étant notamment chargées des formations et des mutations, on trouvera également un binôme Transmission + Intervention bien mobilisé, puisqu’il incline au développement de l’entourage.
Et vous, êtes-vous plutôt RRH ou plutôt Business Partner RH (BPRH), selon la nouvelle appellation du métier ? Dans ce dernier cas, votre eGoPrism traduit une orientation sur des résultats rapides signée par le binôme Concrétisation + Représentation, jusqu’alors plutôt typique des managers opérationnels, et votre talent Relationnel est relayé par un talent Actionnel ciblant la performance. Mais si vous considérez que la première mission des RH est de mettre les pratiques en cohérence avec le discours de l’entreprise sur le respect dû aux collaborateurs, vous présenterez une dominante Relationnelle puis Sensible, car l’Intégration favorise le rassemblement autour de valeurs communes et la Solidarisation se soucie de neutraliser les comportements toxiques qui font courir des risques psycho-sociaux.

En pratique
Evoquant les événements de 1968, Coluche évoquait un recteur d’université désemparé face à des étudiant auxquels « il était censé vendre de l’intelligence alors qu’il n’en avait aucun échantillon sur lui ». Les DRH ne peuvent être crédibles que si elles se montrent elles-mêmes exemplaires dans leur engagement à faire converger les intérêts de l’entreprise et le développement de chaque collaborateur. Une ambition qui se poursuit difficilement à trop court terme et sans l’écoute des autres directions…

 

Nous avons aimé…

« Pour une fonction RH inspirante : une réponse au RH Bashing », Collectif Reconquête RH – coordonné par Michel Barabel

Editions Néret INFO6TM, Entreprises et carrières – 19/10/2017

Michel Barabel est maître de conférences à l’université Paris-Est et professeur affilié à SciencesPo Executive Education. Dans le cadre de cet ouvrage réalisé par le collectif Reconquête RH, il a rassemblé et organisé les contributions de 31 DRH et ex-DRH. 15 experts et consultants RH. 9 représentants des parties prenantes de la fonction RH et 13 professeurs ou maître de conférences, sans compter celles de la blogosphère RH.

Cet ouvrage a été rédigé par des experts de la fonction ressources humaines qui pensent que les attaques systémiques, auxquelles elle doit faire face, regroupées sous le terme « RH Bashing », appellent une réponse.

Article Télérama « Heureux les lambins » – Marion Rousset, février 2020

Agendas surbookés, stress, course perpétuelle… Il est urgent de ralentir !

Courir, remplir sa journée. Sans pouvoir se reposer. Dans notre société allergique aux temps morts, s’attarder n’est pas toléré. Et si, bien au contraire, les instants volés nous libéraient ? Trois ouvrages, “Éloge du retard”, de la philosophe Hélène L’Heuillet, “Les Hommes lents” de l’historien Laurent Vidal, et “Le Pouvoir des liens faibles” réhabilitent la lenteur.

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« Les voeux de Carbone 4 – Urgence écologique et striatum », par Sébastien Bohler, auteur du Bug Humain
Vidéo Youtube

Pour apporter un éclairage nouveau sur la question écologique, il nous tenait à coeur de recevoir Sébastien Bohler, docteur en neuroscience, rédacteur en chef du magazine Cerveau et psycho, et auteur du « Bug Humain – Pourquoi notre cerveau nous pousse à détruire la planète et comment l’en empêcher ».
Au cours de son intervention, Sébastien Bohler nous éclaire sur un petit organe appelé striatum, qui régit depuis l’apparition de l’espèce nos comportements.

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